17 septembre 2008

Pseudo Conte



Il était une fois dans un Assez Vieux Pays, un roi nommé Wiliam qui ne tolérait ni les hèssèmèsses ni les fautes de grammaire. Il fit clamer son message à travers tout son royaume par les Siwens d’eau douce : « Nul ne commettrait de faute de langage en son Royaume sans se faire punir pour trouble à la grammaire publique. » Pour ce faire il avait d’ailleurs créé la brigade de Correction Royale de Stupidité chargée de reprendre chacun ou de l’affubler d’un sobriquet.

Ces noms d’oiseaux n’ayant pas l’efficacité escomptée, il décida d’avoir recours à une terrible dragonne, la vénérable Guylou. Celle-ci vivait sur une île et se nourrissait exclusivement de fauteurs d’orthographe, en ne buvant que du Tobermory cuvée 41.

Un jour la frêle Frehelle, armée d’une pe-Titeplume, décida de se lancer dans l’écriture d’une ode à la nature. La pâle jeune femme ne savait par où commencer tant elle était effrayée à l’idée de faire la moindre faute, ce qui l’aurait condamnée à rencontrer la terrible dragonne. Par un matin pluvieux, elle se mit à écrire. « Jveuxdusoleil » pensait-elle, « comme il n’est pas là, je vais l’imaginer ».

Soleil du matin

Qui point ne vient

Entends mon désir

De la pluie partir

Nuages du midi

Oyez mon envie

De vous voir point

Mis à part au loin

A peine eut-elle tracé ces mots que la brigade des CRS arriva, défonçant sa porte. « Vous avez oubliez un « ne » suivez-nous » Elle eut beau leur expliquer que ce n’était qu’une étourderie qu’elle n’avait pas encore relu son texte, ils ne voulurent rien entendre et la conduisirent devant le seigneur William. Maintenue par les bras, la jeune fille ne put que se laisser entrainer directement sur l’île sous l’ordre du roi intransigeant.

Une Marmotte témoin de la chose, s’empressa auprès de son amie l’Hirondelle qui le chanta à tout va. Entendant cela, un Djin estimant que la malheureuse fautive ne méritait pas tel sort, se transporta immédiatement auprès d’elle. « Désires-tu mon aide ? » lui chuchota-t-il à l’oreille. Frehelle s’empressa d’acquiescer, elle ne pouvait dire mot, la peur scellant ses machoires. Le Djin fit apparaitre un hobbit, ménestrel de surcroit ; ce petit homme qui se nommait Bilbo se mit à jouer une Polka de sa lyre désaccordée et à chanter à tue tête. Les oiseaux s’envolèrent de toutes parts, dérangés par le vacarme. Guylou entendant cela se dit que la malheureuse faute de la jeune femme ne méritait pas de laisser autant souffrir ses oreilles et s’enfuit au fond de sa grotte. Le Djin les ramena sur le continent, dans un endroit du royaume que le seigneur visitait peu et leur bâtit une grande maison.

Frehelle et Bilbo se marièrent alors et eurent beaucoup d’enfants… enfin, une déjà, pour commencer.

7 septembre 2008

Spéléo



Deux silhouettes parmi les ombres,

- On est où là ?

- Je sais pas, j’ai peur ! Allume la lumière, allez s’il te plait, allume, t’es pas drôle !

- Nan mais t’es vraiment une chochotte, dès qu’il fait un peu noir tu te mets à trembler. Allez tiens, prends-la ta lampe, et arrête de pleurnicher.

Un faible faisceau traverse la pénombre qui a envahit la grotte. Les deux explorateurs se rapprochent l’un de l’autre, la présence de la lumière faisant paraitre les parois plus lointaines encore. Un battement d’ailes, loin au dessus d’eux les fait sursauter ; Martine est prise d’un rire nerveux dont le son se répercute, faisant écho au loin. Jacques s’énerve

- Ca va pas de rire comme ça ? lui souffle-t-il à l’oreille, Tu risques de nous faire repérer !

- Désolée, vraiment, je sais pas c’qui m’a pris. chuchote-t-elle, confuse.

Elle étouffe son rire, reprend son souffle, glisse sa main dans celle de son frère et le prie d’avancer

- Mais doucement hein ? J’ai pas envie de tomber.

- T’inquiètes pas va, je sais ce que je fais.

Ils s’avancent précautionneusement, Jacques avance d’un pas sûr, malgré sa sœur accrochée à lui. Le pied de Martine glisse sur une pierre, elle perd prise, entrainée immanquablement vers l’arrière ; elle pousse un cri strident tandis que son frère la rattrape d’une main, se raccrochant à la paroi de l’autre. Elle se love dans ses bras, le cœur battant à tout rompre.

- C’est bon, c’est fini, dit-il, lui tapotant le dos. On avance, regarde la lumière là bas.

- Je voulais pas crier, je voulais pas hein, je… je…

- C’est bon je t’ai dit, mais n’vas pas tomber, il n’a pas de fond ce gouffre hein, tu t’en souviens ?

- Oui, tu m’as dit qu’on était dans une grotte infestée de chauves-souris-vampires-géantes et que le chemin, et ben, il est tout petit et que si je tombe j’atterrirais jamais au fond, et que… et que…

- T’as fini ? On peut y aller, ou tu comptes nous refaire le descriptif en entier ?

Se le tenant pour dit, elle reste coite, éclairant le chemin qui les mène à la sortie. Le bruissement semble s’accentuer, les battements s’approchent de ses oreilles, elle accélère le pas, paniquée. Après quelques tours et détours, ils atteignent une porte. La lumière perce à travers. Elle se jette sur la poignée, mais la porte est fermée, verrouillée. Jacques ricane ; levant sa lampe Martine aperçoit l’éclat de la clef dans la main de son frère.

- C’est pas drôle, allez ouvre, s’il-te-plait…

Devant son ton suppliant, sentant les larmes dans sa voix tremblotante, Jacques capitule et introduit la clef sans la serrure ; il aime bien l’enquiquiner, mais fond à la moindre de ses larmes.

La porte s’ouvre laissant pénétrer un rayon de soleil dans la grange de Grand-Pa, éclairant çà et là la grotte, un amas de métaux, de bottes de paille et de tissus. Tout là haut, près des fenêtres de plexiglas tendues de toile de jute, les chauves-souris roucoulent.

Martine sort, courant vers la lumière, les yeux encore humides et se retourne vers son aîné, un grand sourire aux lèvres

- Dis, demain, on pourra jouer à la poupée ?