7 juin 2010

Défrichage



Mon papy à moi, il est jardinier. C’est un jardinier qui fait de la magique. D’abord, il a fait que des choux. C’est pour ça que mon papa il a que des frères à lui. Parce que les filles, ça nait pas dedans les choux. Moi maman elle m’a dit qu’on choisit pas qu’est ce qu’on aura comme bébé, c’est pour ça que je dis que papy il est magicien du jardin de la vie. Vu que lui il a tout choisi avec ses choux. Maman elle m’a parlé de la petite graine qu’on met dedans le ventre tout ça… Mais je crois papy, moi. J’aime bien le chou même si ça me fait péter. J’aime bien péter, même si c’est pas poli, c’est rigolo.

Mon papa il me raconte que mon papy il a fait la guerre. Celle qu’était contre les allemands, qu’était après celle qu’était la dernière des der. Mon papy il a pas tapé les bouches. Il était avec, même que c’est un fait chaud. J’ai pas tout compris, mais papa il avait l’air de dire que c’était pas très bien. Les bouches, c’est les allemands. Ceux qu’étaient méchants et qui faisaient brûler des gens après les avoir lavés dedans les douches. Comme ça, ils sentaient pas mauvais quand ils brûlaient. Il raconte plein de trucs comme ça pas très gentils sur papy.

Mais mon papy, il est gentil, même qu’il me donne toujours des sous quand il vient nous voir, je préfére des bisous, mais papy, il donne des sous. Le petit billet plié dedans la main quand je viens dire au revoir. Je préfère mamy… Elle me donne des sourires, des bisous. Elle parle beaucoup, mais jamais d’elle. Papy quand il vient, maman elle part. Comme ça il peut dire du mal d’elle sans qu’elle entende. J’aime pas ça, mais je dis rien. Parce que sinon papa et papy ils se fâchent. Et j’aime pas, après papa il dit qu’il fait chaud même quand il neige. J’aime pas quand il dit des trucs et qu’il crie, mon papa.

Mon papy, ça fait longtemps que je l’ai pas vu. Il est toujours jardinier et il fait toujours chaud chez lui. Mamy je lui envoie une carte à noël pour les vieux de l’année qu’est nouvelle. Je dis ce que je fais à l’école et que j’ai mis les sous sur mon compte de l’épagneul pour quand je serai grande. Mon papy, il s’est mis aux roses maintenant. Il en a six dedans son jardin. Pas du plus, pas du moins. Six roses. J’aimerais bien les cueillir mais papa il m’emmène pas. Pis il parait que mamy elle est trop vieille pour avoir des filles, alors je comprends pas pourquoi il les a plantées.

Elles ont l’air importantes ces roses pourtant, parce que papa il en parle beaucoup. Parait qu’elles font de l’eau dans le ventre de papy, je me dis que c’est bien pour qu’il les arrose. Surtout s’il fait chaud. Tonton a appelé papa. Papy il est à l’hôpital, ils vont lui ouvrir le ventre avec une scie. Toute rose. Je serai docteur moi, plus tard, parce que avec ma scie, rose, je soignerai les gens. Papy il est mort en fait. Il aimait pas vraiment les roses. Elles se sont flétries avec lui. Mamy elle dit qu’il lui en aura fait bavé quand il était là. Mais je me rappelle pas qu’elle avait de la bave.

Quand on est mort, c’est pour la vie ? Parce que même si papy c’était un mal colo, qu’il buvait trop et qu’il pouvait pas arroser les roses avec son eau qui voulait pas sortir, même s’il faisait toujours chaud quand il parlait de Paul et de ses tics, ben, moi, je l’aimais bien mon papy.

Il me manque déjà.

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