26 mai 2010

Demain, j'arrête.



Et pourtant je le savais que c’était mauvais. Hier, je disais que demain... Demain. Demain, c’est aujourd’hui. Ça craint. Réveil agréable, un rayon de soleil sur la joue, un sourire, je l’observe, elle dort encore. Ma main sur sa joue, légère. Je me lève, m’allume un clope, me fais couler un petit noir. J’aime ces réveils où je la parcours du regard. Sa peau à peine couverte m’offre le souvenir de la nuit précédente, de toutes les nuits précédentes. Promesse de celles à venir.

J’aime.

Sa petite robe verte, légère, git dans une posture éloquente, froissée, au sol. Ma chemise à ses côtés, tachée de rouge, au col. Son rouge, ses  lèvres qui se sont frottées au tissu de l’habit arraché. Des années après notre rencontre le feu est toujours aussi fort. La même envie, le même lien qui nous unit. Un sourire, encore. Cette vie a trouvé sa valeur en ces hanches bien pleines, cette bouche rouge, quand bien même il est faussé par quelques artifices. Une main aux doigts fins qui se lie à la mienne lorsque nous dansons une sarabande endiablée, le plaisir est il vraiment signe du malin ?

Silencieuse sérénade.

Café avalé, nouvelle chemise enfilée, je l’observe encore un instant, nouveau mégot à la bouche. L’heure des croissants. Bientôt elle va s’étirer dans l’odeur du petit serré et de mon tabac froid, elle pestera, sans doute, sur ma manie qui aura ma peau avant qu’elle ne s’en lasse, de la fumée qui s’échappera encore du cendrier. Oui, un jour j’apprendrai à éteindre correctement mes mégots.  Et quand je reviendrai, croissants chauds à la main, tout juste sortie de sa douche, elle se lovera, humide, contre moi et je la dévorerai avant de me sustenter.

Gargouillis de l’estomac enfin réveillé.

J’ai bien tenté l’amour et l’eau fraiche, mais, après l’amour, me faut mon clope, si possible un café… et, comble du plaisir, à bouffer ! La boulangère, en habituée de mes habitudes, ne pose pas de question, son bonjour reste muet, elle sourit, me tend mes viennoiseries du matin, note - je viendrai régler plus tard - et incline la tête en guise d’au revoir. Accord tacite, respect de mes rituels. Le commerce de proximité, ça se perd, ma bonne dame ! Penses-tu !

Musique lancinante.

Le rouge s’impose à mon regard, le rouge du véhicule qui se tient devant ma porte, rouge, rouge ! La musique a cessé, plus de sirène pour m’emplir les esgourdes d’un air que je n’aurais jamais voulu entendre de si près. Du dernier étage, là, où sans doute elle prend sa douche, s’échappent quelques artifices. Le feu qui nous lie sans doute. Cette flamme si forte, elle me trompe ? L’odeur âcre envahit la rue, emplit ma bouche puis mes poumons, on tente de me faire reculer, je ne bouge pas. Je ne peux imaginer que les paroles prononcées derrière le casque sont réelles, elle est dans sa douche, elle va venir se coller à moi, je vais l’aimer, encore, toujours… et elle pestera contre mon mégot.

Mégot mal éteint.

Peut être est elle encore en vie ? Robe verte, appel d’air et vol au vent. Un morceau de coton froissé, noirci, vert. Ce n’est pas possible, pas possible. Je ferme les yeux, oublie, je dors encore, elle est contre moi, je vais me réveiller, prendre un petit noir et pas de clope. Je lui avais dit pourtant, je le lui avais dit, promis. J’ai menti.

« Demain, j’arrête. »

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Un frisson m'a parcouru le dos...

Merci :)

Castor tillon a dit…

Quand on leur dit que le tabac tue !
Ils n'écoutent rien.

Yunette a dit…

Le tort aussi, ça n'empêche pas nombre de gens de se tromper et de s'enfoncer dans leur délires !
Et, Anonyme... De rien !