6 juin 2011

Bouh !

Maman dit toujours que je suis brave, vaillant, courageux. Et quand elle dit ça, je fais le coq et le bar tabac du coin, fier tout pareil. Parce que j’aime quand maman elle dit ça. Après, j’ai tout chaud à l’intérieur, et j’ai encore plus envie de me casser le cou – même que moi, j’ai qu’un cou, mais papa, souvent, je lui casse les cous – parce que quand je fais ça, maman crie un peu, et après, c’est un gros câlin avec des mots comme « T’es fou mon chéri, comme ton papa » Et comme papa, plus tard, je me marierai avec elle.

Le soir je dors avec la photo de ma maman sous mon oreiller, je la regarde longtemps pour m’endormir avec son image dedans les yeux et rêver d’elle. Mais ça marche pas toujours très bien. En ce moment, je rêve que je fais une grosse chute qui finit jamais jamais, que même je vois pas le fond et puis je voudrais bien me réveiller, mais que j’arrive pas. C’est à cause de gâteaux que j’adore qui sont avec moi, oui, j’adore les gâteaux, c’est de la gourmandise, elle dit, maman. Mais c’est bon la gourmandise, moi j’aime ça.

Pour être courageux, faut faire des choses qu’on a pas le droit de faire. Des choses que si on nous trouve, on se fait gronder. Là je fais une grosse bêtise, mais au moins, on me trouvera pas et je vais gagner. Quand je sortirai avec le drap sur la tête et tout l’air blanc autour, ils vont avoir tellement peur que j’aurai le temps d’aller jusqu’au mur et crier que j’ai gagné, qu’ils m’ont pas trouvé et que c’est moi le plus fort, même si je le sais déjà ça, que c’est moi le plus fort. Maman elle m’avait interdit, parce que c’est très dangereux.

Bon, je n’ai plus que trente deux fois à compter jusqu’à cinquante et je sortirai. C’est pas très facile quand même, de compter dans le noir et puis j’ai la boite du gâteau qui me fait mal dans l’omelette plate du dos, c’est pas pratique. Il fait froid quand même, même avec le drap que j’ai pris pour faire le fantôme. En plus je vais attraper le rhume et maman va me gronder, ça par contre, elle gronde vraiment quand je tombe malade par ma faute. Si je tombe tout court, j’ai des câlins, par contre.

Bon, je sors tout de suite, tant pis… Faut que j’arrête de dormir et que je pousse sur la porte, j’arrive pas très bien, je sais pas si je suis plus le plus fort du monde ou si c’est parce que je suis en train de dormir, mais le couvercle de la porte s’ouvre pas. C’est pas drôle, réveille toi, moi ! Faut pas dormir dedans le froid, faut faire comme dans le film de ceux qui bougent tout le temps, bouger, me réveiller, et sortir…

Mais trouvez-moi ! Ils sont nuls mes copains, ils savent même pas que la meilleure cachette de tout le monde entier, c’est dans l’endroit où t’as les trucs les mieux à manger, les gâteaux qui se mangent sans qu’on les cuise, là, ceux que tu prends quand ils sortent du frigo qui gèle les cons. Et ben voilà, je dis des gros mots, c’est pas bien. C’est peut être parce que j’en suis un, maman elle avait interdit, c’était peut être pour une bonne raison quand même…

Je tombe encore, dans ma tête, je tombe, mais je pense, mes pensées sont loin, c’est bizarre, comme si on me les criait, ça donne le vertige. Mais je m’en fiche, moi, j’ai gagné, et dès qu’ils ouvriront, je ferai le fantôme !

1 commentaire:

Chrysopale a dit…

C'est pas pour rien que je l'ai mis en coup de coeur.

Mais j'ai eu un frisson au moins aussi gros que celui du gamin coincé au froid...